les témoins de jéhovah et la watchtower analysée par brooklyntower

AccueilJéhovahEsaïe 40:22BrooklyntowerLa FoiLe sangIllusionPédophilieOrganisation et ConditionnementRéciprocitéFinancesWatchtower/ONU19756072034ChatHitler et WatchtowerWatchtower ImmobilierBarbara AndersonLettre d’un ancienLes 3 réunions....Apostasie et illusionIls quittent Brooklyn!Un grand C!La générationLes TJ de Suisse...Le livre prédicateursBrooklyntower bibliothèqueFlash PowerAnnuairesRéférencesVideosFriendsContact/Assistance

 New Février 2014. 1914-2014, encore une gaffe!

Barbara Anderson


Une ex Témoin de Jéhovah a été un témoin oculaire privilégié
de malversations au sein de l'organisation Watchtower.
Barbara Anderson

  Pages      1     2     3     4     5
 

Traduction française : Jean-Pierre  février 2008
Contactez Jean-Pierre
 

 

 

Une marque de respect pour les femmes

Harry jouait le rôle d'avocat contre la domination abusive et tyrannique à l'encontre des femmes et des enfants, par des hommes croyants et patriarcaux usant des enseignements de la Bible comme d'un fouet. Beaucoup d'entre-nous étions privés d'informations concernant le cas de nombreuses épouses Témoins, malheureuses, se plaignant du mauvais usage par leur mari de leur autorité comme chef de famille.

Je me souviens d'une conversation que j'ai eue, en janvier 1992, avec Harry et un autre responsable de la rédaction, Eric Beveridge; nous nous trouvions dans le bureau de Harry et je leur ai dit ce que m'avait rapporté des femmes Témoins, pendant mes vacances. Selon elles trop d'hommes, dans l'organisation, traitent les femmes avec bien peu de respect et les considèrent comme étant inférieures. Une femme, en colère, m'avait raconté qu'une Témoin s'était plainte d'avoir été violée par un homme, lui aussi Témoin, alors qu'elle faisait le ménage dans la maison de cet homme. Quand il a été questionné l'homme a admis devant les anciens avoir eu des rapports sexuels, mais selon lui la femme était consentante, de plus il manifesta de la repentance. La femme nia avoir été consentante et dit qu'elle avait été violée. Elle a été exclue pour mensonge; lui n'a pas été exclu parce qu'il a admis et regretté son péché. Les femmes, Témoins, connaissaient l'accusé, et elles étaient scandalisées car cet homme n'avait pas une bonne réputation et elles pensaient qu'il n'était pas digne de confiance. (Par la même occasion le viol ne fut pas rapporté aux autorités)

Mon récit a contrarié Harry et Eric. A la suite de cette discussion Harry demanda à Eric d'écrire une séries d'articles (15 pages) parus dans le numéro du 8 juillet 1992 de Réveillez-vous! sur le thème suivant: " Les femmes sont dignes de respect" à propos du respect dû aux femmes; il me demanda de faire des recherches afin de fournir des matières pour ces articles. De nombreuses femmes écrivirent des lettres d'appréciation peu après la parution de ce numéro de Réveillez-vous! Ce qui nous a le plus déconcerté c'est que 75% des lettres n'étaient pas signées, parce que les femmes qui les avaient écrites, avaient peur des représailles éventuelles tant à la maison qu'au sein de la congrégation, si la Watch Tower envoyait leur lettre au collège des anciens de leur propre congrégation, afin qu'une suite soit donnée à leur plainte.

Des articles sur les agressions sexuelles enfin publiés dans Réveillez-vous!

La politique de stricte confidentialité de l'Organisation exige des Témoins impliqués dans une affaire judiciaire, au sein de la congrégation, de ne parler que devant le comité judiciaire, (actuellement comité de discipline religieuse) et de ne rien dire en dehors de ce comité. C'est pour cette raison que je n'entendis parler d'agression sexuelle sur mineur au sein de l'Organisation qu'en 1984, pour la première fois.

Une jeune femme qui travaillait avec moi au département de construction et de génie civil raconta, avec animation, à quelques membres du département, qu'un ancien très en vue de la congrégation qu'elle fréquentait avant de venir au Béthel, avait été arrêté pour pédophilie. Je découvris par la suite que l'agresseur avait été condamné et envoyé en prison où il a purgé une peine de trois ans. Cet ancien, populaire et charismatique, avait abusé de sa propre fille ainsi que de nombreuses autres jeunes filles de sa congrégation, pendant des années, les menaçant afin qu'elles se taisent; ce qui lui fut très facile à cause de son autorité naturelle et de l'âge de ses jeunes victimes.

A ce moment là j'ai pensé qu'il s'agissait d'un comportement isolé, mais par la suite je découvris combien je me trompais. A l'évidence, il y avait plus que ce seul cas relaté, dans lequel des enfants de Témoins ont été abusés, cependant beaucoup avaient gardé le silence; le Réveillez-vous! du 22 janvier 1985 portait le titre suivant en couverture: " Les agressions d'enfants – Le cauchemar des mamans". De par l'expérience acquise au sein du département de la rédaction, j'ose dire qu'il apparaît improbable que la Société publie une série d'articles traitant du problème des enfants victimes d'agressions sexuelles à moins d'avoir constaté une augmentation de tels cas au sein de ses rangs et que les responsables des Témoins comprennent que les parents ont besoin d'instructions pour, non seulement, protéger leurs enfants, mais aussi,  pour agir en cas de suspicion de mauvais traitements et pour être à même de reconnaître les premiers signes de telles agressions. Malheureusement, les articles ne donnaient pratiquement pas d'informations sur le traitement que devaient suivre les victimes et n'évoquaient pas l'impact émotionnel ressenti par ces dernières; il n'était pas indiqué qu'il fallait en informer, sans attendre, les autorités. En fait, ce sont les responsables scolaires de la partie nord de New York qui ont signalé, un cas d'agression sexuelle sur enfant, aux autorités.

Le Réveillez-vous! du 8 octobre 1991 portait le titre suivant en 1ere page: "Abus sexuels sur les enfants: comment en effacer les séquelles?" et contenait une série d'articles contre les agressions sexuelles sur enfants. La publication présentait de nombreuses informations spécifiques écrites dans le but d'apporter aide et assistance aux victimes d'agressions sexuelles pour surmonter le contrecoup dévastateur suite aux agressions subies. De plus des informations complémentaires expliquaient aux familles et aux amis des victimes pourquoi celles-ci adoptaient un comportement si souvent destructeur. Ce périodique fut publié un peu avant la fin de mon travail de recherches pour la rédaction du livre de l'histoire des Témoins.

Ma réaction à la lecture de ces articles dut être la même que celle de nombreux Témoins de Jéhovah –je pensais que la raison d'être de ces informations était d'atténuer les effets durables de ce que beaucoup considéraient comme un crime abominable. Nombre d'entre nous ont pensé que la couverture médiatique toujours plus importante, pendant les années 1980, dans la révélation de secrets cachés à propos d'agressions sexuelles sur mineurs au sein même des églises et d'autres organisations était la raison principale de la publication de tels articles. Après tout, raisonnablement parlant il y avait certainement des adultes qui, avant de devenir Témoins de Jéhovah, avaient pu être sexuellement abusés et pour lesquels les informations parues dans le Réveillez-vous! étaient fort utiles.

Le quartier général, après la parution de ce périodique, a reçu des milliers de lettres et d'appels téléphoniques exprimant leur reconnaissance au Collège central pour l'aide fournie par le contenu des articles; bien plus que pour tout autre article de son histoire, bien loin devant un autre thème, à forte connotation émotionnelle paru dans le Réveillez-vous! du 8 juillet 1990: "L’expérimentation animale — Crime ou bienfait?".

Les agressions sexuelles d'enfants au sein de l'organisation posent problème.

A la fin de l'année 1991, par l'intermédiaire d'Harry j'appris les raisons qui en ont motivé la rédaction, et après l'autorisation de Lloyd Barry, la publication des articles écrits par deux membres de la rédaction à savoir, Lee Waters Jr., et Harry lui-même. Lee était connu comme un homme plein de compassion  et très à l'écoute des besoins et des droits de groupes minoritaires.  Harry m'apprit que Lee et lui-même avaient lu un essai intitulé: "Aller de l'avant, de l'aide pour les Témoins, dans le traitement des questions d'abus, et de victimisation dans leur vie." (http://www.silentlambs.org/education/movingforward.htm) qui avait circulé parmi les Témoins aux USA entre 1989 et 1990. Je ne me rappelle pas de quelle façon cet essai est arrivé au département de la rédaction, mais il a laissé une profonde impression. Il a été écrit par Mary Woodard, Témoin de Jéhovah, qui a discuté des effets des agressions sexuelles sur mineur, elle était elle-même impliquée ainsi que d'autres femmes Témoins de Jéhovah. Un ancien de Floride a contacté Mary et l'a invitée à venir au département de la rédaction pour discuter du sujet avec Harry et Lee et c'est son apport qui a servi de base au Réveillez-vous! du 8 octobre 1991 pour les articles traitant des abus sur les mineurs.

En 2003, j'ai eu une longue conversation avec Mary, qui avait tenté de se suicider en 1992, au sujet de l'invitation qu'elle avait acceptée de venir au département de la rédaction. Elle me montra également la correspondance privée échangée avec Lee pendant que ce dernier préparait les articles.

Il y était mentionné des accusations à l'encontre de personnes qui avaient abusé de mineurs alors qu'elles étaient Témoins de Jéhovah, ce que Réveillez-vous! ne pouvait  mentionner la plupart de ces crimes n'ayant pas été dénoncés. J'appris par la suite que les Témoins de Jéhovah de ma congrégation suivaient scrupuleusement les règles établies en ne dénonçant qu'exceptionnellement auprès des autorités les affaires de ce genre. Cependant, personne à ma connaissance travaillant dans le département de la rédaction, moi-même y compris, n'a jugé une telle situation comme déplorable, car nous pensions que l'Organisation de Dieu pouvait proposer des solutions bien meilleures à ce problème que les autorités gouvernementales. De plus, nous n'avions pas envie d'aller laver notre linge sale sur la place publique, pensant que cela porterait atteinte à la réputation des Témoins de Jéhovah. Généralement ce genre d'accusations conduisait à la tenue d'un comité judiciaire qui statuait secrètement au sein de la congrégation. (Quand le collège local d'une congrégation apprend une faute commise par un membre de la congrégation, il forme un comité composé de 3 anciens ou plus, qui est chargé d'examiner l'affaire et de prendre les mesures nécessaires). Cependant, si les accusations des victimes peuvent être mises en doute, (par manque de précision sur le lieux, dans le temps etc.) et de ce fait le pédophile non repris, les malheureuses victimes Témoin seront priées de garder leur opinion pour elles-mêmes au risque d'être réprimandées et disciplinées.  De telles situations engendrent de l'aigreur et nombreux sont ceux qui gardent le silence au sujet d'abus dont ils ont été victimes pensant qu'il s'agit d'une circonstance tout à fait inhabituelle au sein de l'organisation Watch Tower. "Laissons Jéhovah opérer" se disent de nombreux membres insatisfaits, pensant que ce dernier essuiera toutes les larmes dans le futur paradis terrestre.

Comme j'avais terminé mon travail concernant le livre de l'histoire des Témoins, vers la fin 1991,  j'ai été à nouveau assignée pour des recherches au département d'architecture, mais quelques mois après, Jack Barr est venu à mon bureau pour me dire qu'Harry ainsi que d'autres responsables de la rédaction avaient besoin de moi pour effectuer des recherches. C'est ainsi que, dans le courrant de l'année 1992, j'en encore appris un peu plus, des membres de la rédaction, au sujet des agressions sexuelles sur mineurs perpétrés au sein des congrégations des Témoins de Jéhovah dans le monde entier.

Puis Lloyd Barry autorisa la préparation d'un autre article sur le sujet, qui parut dans le Réveillez-vous! du 8 avril 1992, sous le titre:"J'ai pleuré de joie". Cet article présentait des extraits de lettres envoyées à la Société par des victimes, leurs amis et leur famille pour exprimer la profonde appréciation au Collège central à la suite du numéro de Réveillez-vous! du 8 octobre 1991.

De nombreux lecteurs Témoins ont ressenti les informations, du Réveillez-vous! du 8 octobre, comme une brise rafraîchissante circulant au sein de l'organisation, mais en réalité on avait ouvert la boîte de Pandore en permettant aux milliers de survivants qui avaient été, alors qu'ils n'étaient encore que des enfants victimes d'abus sexuels, de chercher le traitement pouvant les aider sur les plans mental et physique, et de se confier aux membres Témoins pour dénoncer ceux qui à l'intérieur de l'organisation ont abusé d'eux.

Vers quelles thérapies faut-il se tourner?

Les articles de Réveillez-vous! tentaient d'apporter une aide aux victimes, devant faire face aux répercussions suivant les agressions dont elles avaient été victimes enfant, en suggérant; soit de recourir à la consultation d'un psychiatre si nécessaire, ou de chercher une oreille attentive et amie auprès d'un membre de la congrégation. Cependant, une grande partie du Collège central, et spécialement Ted Jaracz, voyait d'un mauvais œil cette idée de réconfort apporté par l'intermédiaire de thérapeutes professionnels, prétendant que la plupart des conseils exprimés par ces derniers étaient générés par le monde de Satan. Le Collège central et de nombreux hauts responsables de la Watch Tower estimèrent  que la mise en application des conseils bibliques présentés dans la littérature de la Watch Tower amènerait une meilleure stabilité psychologique, même dans le cas de traumatismes dus à des agressions sexuelles pendant l'enfance. En général les conseils donnés par ceux considérés comme mûrs étaient, peu importe le type de souffrance ressentie: "lis la Bible, viens au réunions, et participe à la prédication (le porte à porte)". Ayant été découragé de chercher de l'aide, sous forme de thérapie, à l'extérieur de la congrégation, les Témoins victimes d'agressions sexuelles dans leur enfance, se tournèrent vers les anciens, ce qui vira souvent au cauchemar tant pour les victimes que pour les anciens.   

Le réveil fut rude pour toutes les victimes d'abus qui espéraient, après la parution du Réveillez-vous! du 8 octobre 1991, observer un changement d'attitude à leur égard au sein de l'organisation. La plupart des anciens ont gardé, sans se remettre en question, leur approche du problème, à savoir: seule la mise en application des Ecritures peut guérir les victimes de mauvais traitements en dehors de toute référence provenant d'ouvrages publiés dans le "monde", et ce contrairement à ce qui avait été suggéré par le Réveillez-vous! du 8 octobre qui en contenait une liste. (Ceci explique pourquoi tant de responsables des Témoins sont toujours en opposition avec les informations paraissant dans Réveillez-vous!)

Lorsque la mémoire des victimes refoule le passé

Un point important abordé par Réveillez-vous! concerne une étrange réaction connue sous le terme de "mémoire refoulée". Ce sujet n'était pas du goût des Témoins influents. De nombreux Témoins ayant été abusés alors qu'ils étaient enfants ont encore en mémoire ces événements des années après, ce que Lee a remarqué et qui est corroboré par les lettres d'anciennes victimes d'abus, ainsi que par leurs thérapeutes. La fiabilité de ces souvenirs est devenu le centre d'un débat et de controverses au sein même des professionnels de la santé mentale, et qui plus est dans l'organisation Watch Tower. Au quartier général, à Brooklyn, les congrégations sont supervisées par le département du service. Les hommes travaillant dans ce département, sous la direction de Ted Jaracz, membre du Collège central, répondaient  négativement, lorsque des anciens les interrogeaient à propos de l'anomalie appelée "la mémoire refoulée". En fait, je savais que Jaracz était un partisan de la mouvance luttant "contre la mémoire refoulée". Mais ce sujet ne fut plus abordé après qu'Harry ait démontré que la mouvance contre la mémoire refoulée a été mise en doute par des enquêteurs.

Le trouble de la personnalité multiple (TPM) remplacé par le trouble dissociatif de l'identité (TDI) est devenu un sujet de débat brûlant. Même si le syndrome TPM n'est jamais indiqué dans les publications de la Watch Tower, et ne figure pas non plus dans la correspondance adressée aux collèges d'anciens; ces derniers ont été mis au courant de ce phénomène par les victimes souffrant de ce traumatisme, dû à des agressions sexuelles subies durant leur enfance au sein de la congrégation, certains étant même perçus comme souffrant de démonisme. Quelle aide espérer alors que certains responsables au sein du département du service considèrent le TPM,  le TDI et la mémoire refoulée comme une manie et ont peu de considération pour ceux qui souffrent. Face à une telle confusion et à l'incrédulité de la part des responsables de la Watch Tower à propos du TPM, Harry me demanda d'écrire un article sur ce sujet. Malheureusement l'esclandre provoquée par le Réveillez-vous! du 8 octobre 1991 amena Lloyd Barry à renoncer à publier la moindre nouvelle ligne sur ce sujet  par peur de causer encore plus de controverses qu'il n'y en avait déjà.

La confusion perdure

Le département du service adopta une ligne de conduite qui ne réconforta pas les victimes d'abus.  Ainsi il fut répondu aux requérants de "lire plus souvent la Bible et de regarder vers  l’avant, vers le Monde nouveau dans lequel tous les problèmes disparaîtront".  Ce n'était pas, bien sûr, la solution pour un problème si complexe. Les avis, dénués de tact, donnés par ces hommes de "passer par-dessus" n'étaient pas du goût ni des victimes, ni des membres plus libéraux du département de la rédaction. De fait, lorsque des victimes appelaient et s'entretenaient avec des membres du personnel de la correspondance et de la rédaction, elles étaient traitées avec compassion, et étaient tenues au courant des dernières informations concernant ce problème. Ce qui résulta de tout cet ensemble de contradictions, fut de replonger dans leur état de victime celles ou ceux qui avaient besoin d'aide et de laisser les anciens qui appelaient dans une confusion totale.

A la fin de décembre 1991 tous les anciens des congrégations assistèrent à l'Ecole du ministère du Royaume pour une formation complémentaire et une mise à jour des prescriptions de la Société. Peu après, le 23 mars 1992 une lettre fut envoyée à tous les collèges d'anciens des Etats-Unis. La lettre reprenait des pensées qui avaient été examinées dans les écoles fin décembre 1991, à propos de sérieux problèmes rencontrés par les victimes d'abus sexuels, alors qu'elles étaient enfants, et la lettre ne condamnait plus comme par le passé les thérapeutes professionnels, mais reprenait le programme de l'école qui se référait aux informations parues dans le Réveillez-vous! La lettre pleine de compassion recommandait aux Témoins désirant suivre un traitement psychiatrique, psychologique, ou toute autre thérapie de prendre les précautions nécessaires tout en reconnaissant qu'il s'agissait d'un choix personnel.  La lettre précisait également que les anciens ne devaient pas étudier les méthodes thérapeutiques afin de remplacer éventuellement les thérapeutes ce que certains sont tentés de faire, encore, de nos jours. Elle formulait d'excellentes suggestions à propos de ce que l'on pouvait dire aux victimes. Malheureusement ce point de vue n'allait pas durer bien longtemps.

A l'intérieur de ce que l'on peut considérer comme un refuge formé par les congrégations, les secrets mauvais ou dégoûtants perduraient, et pour des raisons incompréhensibles la protection était assurée au profit des abuseurs, comme si rien ne s'était passé. En fait, un secret particulièrement déplaisant se rapportait à des instructions personnelles envoyées, en 1992 à des surveillants de districts ou de circonscription, par un membre du Collège centrale qui selon Harry, n'était autre que Ted Jaracz : les surveillants devaient rencontrer les victimes d'abus en vue d'obtenir leur silence et dans le cas contraire de procéder à leur exclusion. En 1994 mon mari et moi-même étions, dans le bureau de Harry, en train de feuilleter une pile de lettres récemment arrivées au quartier général en provenance de toutes les parties du pays se plaignant de cette situation. On peut noter que l'un des surveillants, dont le nom est fréquemment cité à propos de ces mesures d'intimidation, est devenu par la suite un membre du Collège central.

"Ne jetez pas le bébé avec l'eau du bain" voilà ce que nous répétait plusieurs fois par jour Harry lorsqu'il voyait, à la lumière des derniers développements, les nouvelles rapportées par les responsables du département de service, faisant état d'aggravation à la suite de la ligne dure préconisée. Il était personnellement concerné par l'impact que la saga des agressions sur enfant, rapporté jour après jour, pouvait avoir sur nous et souhaitait que cela ne nous amène pas à quitter l'organisation.

Nous retournons chez nous au Tennessee

Nous avons pris la décision, en août 1992, de terminer notre séjour dans le complexe immobilier de la Watch Tower et de quitter Brooklyn à la fin de l'année, à cause des problèmes de santé de mes parents âgés. Cependant, avant de partir j'ai encore pris du temps pour effectuer un dernier projet de recherches. Harry m'autorisa d'emmener avec moi une quantité d'informations en vue d'attirer l'attention du Collège central et lui prouver que le problème des enfants agressés au sein de l'organisation était important. Quelques semaines après que j'aie quitté le quartier général j'envoyai à Harry, un volumineux paquet de documents d'informations que j'avais recueillies, et qu’il transmit à chacun des membres du Collège central.

Pendant plus de 10 ans nous avions côtoyé plusieurs milliers de personnes de "la famille du Béthel", ce qui a représenté une expérience tout à fait originale. Ainsi en retournant à notre domicile au Tennessee, nous avons quitté, littéralement, des centaines d'amis, et bien entendu notre fils et notre belle fille. Dans les jours qui ont précédé notre départ, Joe et moi-même avons reçu des centaines de messages pour nous dire au revoir. Je conserve comme un trésor un petit livre, confectionné par mes collègues du département de la rédaction, rempli d'expressions d'affection et de regrets de ne plus pouvoir collaborer ensemble plus longtemps et qui nous souhaite de bonnes choses pour le futur. Si seulement ils avaient pu imaginé ce que le futur nous réservait! Dans le petit livre, Harry exprima le plaisir qu'il avait eu de travailler avec moi, et dit combien ma serviabilité, ma détermination et ma compassion allaient lui manquer. Lee déclara qu'il ne pouvait pas encore imaginer combien j'allais lui manquer. Il rajouta que mon soutien, mon apport et mes recherches étaient inestimables. Un autre responsable des rédacteurs, Jim Pellechia, me remercia d'avoir un peu secouer les choses. Toutes ces observations se rapportaient spécifiquement à mon travail, en vue de persuader le Collège central de changer certaines règles de l'organisation dans le traitement des cas d'agressions sexuelles sur enfants. Je me rappellerai toujours de mon dernier jour de travail et particulièrement, lorsque David Lannelli me dit au revoir et me remercia chaleureusement d'avoir découvert ce que plus personne dans l'organisation ne savait –que William H. Conley, et non Charles Taze Russell, avait été  le premier président de la Watch Tower.

Je partis sans regrets. Pendant que je me trouvais au centre mondial des Témoins de Jéhovah, j'avais donné le meilleur de moi. Bien que j'aimais ces personnes, j'avais un dilemme. Après avoir quitté New York pouvais-je laissé tomber ma compassion et oublier tout ce que j'avais appris au sujet du scandale caché des agressions sexuelles sur enfant au sein de l'organisation Watch Tower? Je savais que si par compassion je remuais ces choses en dehors du Béthel, je risquais d'être exclue. Quand j'ai quitté New York je n'ai pas abandonné la compassion sincère que j'avais pour les victimes de ces loups malhonnêtes déguisés en brebis opérant au sein de l'organisation, mais à présent que pouvais-je faire?  Les années qui suivirent furent stressantes pour ne pas dire plus.

Peu après notre retour au Tennessee, une lettre datée du 3 février 1993 a été envoyée à tous les collèges d'anciens des Etats-Unis à propos des agressions sexuelles sur mineur. Apparemment le travail que j'avais effectué portait du fruit, car cette lettre contenait certaines informations que j'avais incluses dans le courrier envoyé au Collège central. De nombreuses suggestions, dans le but d'apporter de l'aide aux victimes, étaient conçues, particulièrement, pour celles souffrant de troubles longtemps après l'événement. L'attitude du Collège central paraissait plus conciliante envers la réalité de la mémoire refoulée. Dans la lettre il était également répété que le fait de consulter un professionnel de la santé en vue de recevoir de l'aide, et de rapporter l'agression aux autorités ne représentait pas un acte désobligeant vis-à-vis des anciens. Et ce n'était pas tout. Un nouvel article, extrêmement bien documenté sur le thème des agressions sexuelles sur mineur, parut dans Réveillez-vous! du 8 octobre 1993, il parlait de professionnels compétents aidant les victimes d'abus sexuels pendant leur enfance.

J'ai continué mes recherches pour le département de la rédaction depuis mon domicile. Parmi les choses examinées je me suis penchée sur le problème de l'agression sexuelle sur mineur au sein des autres religions et plus généralement de la société. En un sens j'espérais comme quelques-uns au quartier général de la Watch Tower, que le Collège central modifierait sa politique à l'égard des agressions sexuelles sur mineur.

Cependant, au lieu de voir les premiers résultats de mon travail, j'appris avec horreur, quelques mois après notre retour à la maison, qu'au sein des congrégations de notre région un grand nombre d'agressions avaient eu lieu dans un passé récent et qu'aucune d'entre elles n'avaient été annoncées aux autorités. Ces agressions étaient rapportées à des hommes n'ayant peu, voire pas d'idées sur le processus à suivre dans ces affaires complexes d'accusations pour agressions sexuelles, voilà qui était pour le moins dérangeant, ou même effrayant.

 

Home